
Paris, 5 sept (EFE).- La gauche et l'extrême droite ont souligné ce jeudi leur irritation envers le président français, Emmanuel Macron, qui, près de deux mois après les élections législatives qu'il a convoquées de manière anticipée, n'a pas encore nommé de premier ministre qui puisse avoir une suite dans une nouvelle Assemblée nationale très divisée.
Le vice-président du Rassemblement National (RN), Sébastien Chenu, s'est plaint sur la chaîne BFMTV que le président français filtre chaque jour un nouveau nom de possible premier ministre qui "incarne le monde d'avant" et qui prétend lui soumettre son approbation.
"Il n'y a aucune cohérence, aucune ligne politique", a affirmé Chenu, insistant sur le fait que le parti de Marine Le Pen est "la première force politique" de l'Assemblée nationale issue des élections du 30 juin et du 7 juillet, et que "l'on ne peut pas agir sans nous".
Le dirigeant du parti d'extrême droite n'a pas voulu donner le nom d'un premier ministre qui serait acceptable pour eux, arguant que "nous ne sommes pas le directeur des ressources humaines d'Emmanuel Macron". Mais il a en même temps rappelé les trois "lignes rouges" pour que ses députés ne censurent pas immédiatement un chef du gouvernement qu'ils ne soutiennent pas.
Ces conditions sont que le premier ministre "respecte le RN comme première force politique" même s'il est dans l'opposition ; qu'il s'engage à une réforme électorale pour changer le système majoritaire actuel qui les a tant pénalisés pour un autre proportionnel ; et qu'il aborde les trois thèmes que son parti considère fondamentaux : le contrôle de l'immigration, l'insécurité et le pouvoir d'achat.
Dans une ligne similaire, Laurent Giacobelli, porte-parole de son parti, a déclaré qu'ils en avaient "assez d'être le jouet d'Emmanuel Macron" qui "nous lance des noms, nous les fait commenter et puis une fois qu'il s'est amusé, les retire et en lance d'autres".
Le Nouveau Front Populaire (NFP), la coalition qui regroupe les formations de gauche, a publié ce jeudi un communiqué dénonçant que "Emmanuel Macron plonge le pays dans l'impasse qu'il a lui-même construite".
Il a également souligné que "rejeter a priori tout premier ministre qui ne lui convient pas sous prétexte d'éviter une censure a posteriori par l'Assemblée nationale est un échec".
Pour la coalition de gauche, le président français "n'a que deux options", soit "mettre un gouvernement du NFP, qui est arrivé en tête aux urnes," soit "un gouvernement du camp présidentiel qui ne pourrait se maintenir que grâce à un accord tacite avec l'extrême droite".
La cheffe des Écologistes, Marine Tondelier, qui est l'une des signataires du communiqué, a déclaré dans une interview à la station France Info qu'elle était "profondément désespérée par le spectacle qui est offert aux Français" avec un exécutif qui est en fonction depuis 51 jours, et tout cela parce que "Macron ne veut pas céder le pouvoir".
"Emmanuel Macron - a ajouté Tondelier - est comme un enfant qui ne veut pas descendre du manège", et elle se dit convaincue qu'"au final, il n'aura d'autre choix que de nommer Lucie Castets", qui est la candidate à la première ministre du NFP.
Le président français est en consultations depuis le 23 août pour tenter de trouver un chef de gouvernement qui remplisse deux conditions : qu'il ne soit pas rapidement déposé par une motion de censure et qu'il ne démantèle pas les politiques qu'il a mises en place depuis son arrivée à l'Élysée en 2017.
Mais jusqu'à présent, il n'a pas trouvé la personne adéquate dans une chambre basse qui présente un niveau de fragmentation inédit avec trois grands blocs apparemment irréconciliables.
Le premier est le NFP avec 193 députés obtenus avec 28 % des voix, très loin des 289 de la majorité absolue.
Le deuxième est le camp macroniste, qui a subi un énorme revers électoral lors des législatives, bien qu'il ait réussi à sauver les meubles avec la stratégie du 'cordon sanitaire' face à l'extrême droite et se soit retrouvé avec 166 sièges.
Enfin, le RN et ses alliés doivent se contenter de 142 députés, malgré avoir été de loin les plus votés, avec 37 % des suffrages au second tour.